Le réveil sonne plus tôt ce matin, on quitte le Dalsland aujourd’hui pour retourner à Göteborg. Il faut nettoyer les chalets qui sont ensablés et préparer nos bagages. La veille au soir, nous avons tenté de nettoyer nos vélos et de faire un peu de mécanique. Nous n’avons plus de patins de freins, en une journée la gomme a disparu. J’inverse alors l’avant et l’arrière pour assurer un minimum de sécurité sur les 140 kilomètres du lendemain, je règle tant bien que mal mes vitesses, mais sur 10 il n’y en a plus que 6 qui fonctionnent. Tout est foutu, les gaines sont sableuses, et les câbles pareil. Le copain Florian n’a plus de plaquettes de frein pour ses freins à disques, il ne fera pas toute la route à cause de ça… En revanche John lui n’aura plus de frein à l’arrière; il a cassé son câble de frein et impossible de replacer le nouveau câble dans la manette campa. Ce sera un freinage avant pour l’américain.
Une fois le ménage fait, les sacs dans la camionnette et le brief effectué par le maitre du jeu Johan, nous partons pour le dernier jour comprenant 143 kilomètres et leur 1600 m de dénivelé positif.
Nous sommes chanceux, nous avons du soleil aujourd’hui, la route est sèche car il y a beaucoup de vent aussi. Je fais la route avec Frank, John (l’heureux gagnant du Festive 500 2014), et Niklas (the norvegian wild cat) un jeune garçon de 15 ans venu du Danemark pour l’occasion. Il est incroyable, il fait des bunny hop pour changer de voie sans prévenir, arrache des brindilles aux arbres, et pour ses virages, comme il n’a plus de frein, il déclipse sa pédale pour faire frotter sa cale SPD. Il a des pneus de 23 alors que nous sommes tous en 28 voir 32. Il a une parfaite maitrise de son vélo, c’est un champion dans son pays, d’ailleurs il est venu à vélo et en car de chez lui avec son argent de poche. Nous sommes rejoints par moment par Ricky qui ralentira le pas et attendra un autre groupe, nous retrouvons Fredrik, qui la veille avait cassé son dérailleur, premier ride de plus de 100 kilomètres pour lui. Derrière cet air innocent ce cache aussi un champion, c’est un compétiteur et il rafle plusieurs médailles en cyclisme. C’est un peu un chat noir, il casse sa chaine en cote, je crois que c’est le changement de chaine le plus rapide que j’ai vu de ma vie. Une minute et quelques secondes plus tard nous repartons de plus belle. Les paysages scandinaves s’ouvrent à nous, plus cléments, plus doux que la veille.
À chaque virage un peu brutal, c’est la même synchronisation qui apparait, Niklas déclipse pour parer un virage plus serré, pendant que j’entends John murmurer avec stupeur :
wow wild cat!
Nous rigolons à l’imiter, déclipsant nos chaussures, faisant mine de prendre des virages serrés sur les lignes droites ou juste pour le fun.
Peu de temps après, deuxième rupture de chaine pour Fredrik! Il répare, on discute et on repart.
10 kilomètres plus tard, rebelotte !
Mais cette fois le dérailleur à l’air mal en point.
Il répare encore mais cette fois ça durera un peu plus longtemps, galets de dérailleurs à revisser, chaine à refixer, alors Frank et Niklas font des photos pendant qu’il s’énerve contre ses composants, il a les mains qui saignent, à cause du câble de dérailleur qui n’a plus d’embout, à travers la graisse noire, les gouttes de sang apparaissent. Nous essayons de l’aider tant bien que mal. Le vent est puissant dans les plaines et il reste encore pas mal de kilomètres.
Nous nous faisons rattraper par le groupe de Johan et Ricky est avec eux cette fois, leur rythme est un peu plus cool que le notre. Nous décidons de faire un peu de chemin avec eux, mais quand je me retourne je ne vois plus mes compagnons de route!
Je ralentis j’attends un peu toujours pas là… quand soudain j’entends :
Fuckin frenchy guy! you will not leave us!
We’re reunited!
Mes compagnons sont là! Les rires explosent, la bande de joyeux lurons est réunie! Et on repart de plus belle affrontant le vent. Je leur demande ce qu’il s’est passé. Rien de surprenant, Fredrik a ENCORE cassé sa chaine
Je pense que désormais elle doit être aussi courte qu’un collier. Les coups de pédales sont autant soutenus que nos rires. Et nous quittons le groupe de Johan pour retrouver une allure de croisière normale. Durant toute la journée nous restons ensemble, à travers les bois, les côtes, les plaines.

Après avoir passé des plaines horribles sans être à l’abri du vent et avoir fait des relais pour s’abriter les uns les autres,
un vrai esprit d’équipe règne dans ce groupe et c’est tellement plaisant, nous n’avons plus grand chose à manger,
nous puisons dans nos réserves. Les poches et les bidons presque à secs on voit le panneau Vänersborg dans 20 kilomètres!
OUF nous sommes sauvés!

Quelques peu fatigués, nous augmentons la cadence pour finir au plus vite. Aller c’est un aller retour vélotaf sans feux de circulation, c’est rien. Je vois Niklas accélérer et Frank nous déposer, je me retourne et je vois un peloton arriver à toute vitesse! C’est Julius avec mes camarades d’hier ! La vitesse est folle! Je n’ai pas envie de me retrouver seul, je vois John remonter le train et Fredrik qui peine avec son petit plateau tellement sa chaine est courte. Mais « tilt » il passe tout à droite et c’est parti! On accroche le pack à 40km/h environ pour les derniers kilomètres, je ne veux pas lâcher Frank et Niklas, je tente une attaque, je remonte le peloton et le dépasse. Mais je me retrouve chasse patate durant plus d’un kilomètre, mes efforts sont vains, et mon genou me relance, pas grave: « ralentis un peu » me dis-je plutôt que laisser ton genou en Suède, ça ne sert plus à rien. Je suis seul. Je me fais rattraper par le peloton à 1 kilomètre de l’arrivée, je tente quand même de tenir la fin du groupe. Qui aurait cru qu’on allait finir ce voyage par un sprint massif? Pas moi en tout cas! Nous arrivons au café Sessan. on se serre tous dans les bras pour ce travail effectué aujourd’hui. Et on file manger des pizzas en terrasse sous le soleil. Après avoir mangé comme des goinfres, nous repartons retrouver les autres participants et la camionnette qui a les bagages pour aller à l’hôtel, se doucher et retourner manger dans la ville. Le lendemain nous reprendrons la route pour aller à l’aéroport, certains iront en trains et d’autre à vélos comme Frank, Joachim, John B et John .

Merci à Johan, Julius et les mecs du Wenersborgs Racer Club pour l’évènement, (l’an prochain, promis je reviens avec d’autres Français!)
Encore un énorme merci à Hagen, Klas, David, Frank, John, Florian, Jambi, Jost, Niklas, Ricky, Fredrik, John, Joachim, Otto, Henrik, Jochen.
Pour couronner le tout, on m’a même demandé d’écrire un petit paragraphe sur le blog de Rapha !